51-TEMPS ET SPORTS HEROIQUES

Publié le par Djipy

TEMPS ET SPORTS HÉROÏQUES

 

La guerre est terminée mais pas les restrictions !
Les jeunes veulent s’amuser après les oppressions …
En banlieue, notre quartier est plutôt apprécié
 Car tout près de l’église,le foot nous galvanise !

Le terrain bosselé nous force à composer
Avec les fantaisies d’une balle sans poésie,
Qui rebondit, ou pas, quand elle en a envie …
Et jamais, du côté que vous avez pensé. 
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Ballon à bandes de cuir, normalement cousues,
Qui s’apprête à fuir car souvent décousues …
Ce ballon qui se voudrait sphérique
Entoure une chambre à air anémique,
Qui a dû faire la guerre, voire plusieurs guerres,
Si on compte ses blessures fermées par des Rustines.

Cette vessie, comme une baudruche,
Dans la sphère de cuir est glissée,
Puis, avec une pompe : gonflée.
On ferme ensuite l’ouverture avec une languette de cuir
Comme une chaussure, avec un lacet de cuir.

Pour cela, un passe-lacet s’avère nécessaire.
L’opérateur s’appliquant à vouloir bien faire,
Dans la fièvre finale du travail presque accompli,
Fait parfois riper l’outil qui crève la vessie ! ! !

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C’est tout à refaire ! Et chacun vocifère …
Il faut recommencer … et encore patienter !
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C’était l’ère du football aux récrés de l’école
Ou même dans les rues avec une vieille casserole !
Quant aux grands du club des J.C.L.— Jeunes Croix-Luizet —
Ils jouent fort bien formés dans ce creuset.
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Puis, en 1946, un peu grâce à mon frère Robert,
Débute avec ses copains, une nouvelle ‘’ère’’.
Ils fignolent un terrain de basket ‘’tartignol’’,
Parallèle au terrain maladif de football.

C’est le père Maucorps
Qui leur apprend les rudiments de ce sport.
Une équipe ‘’Seniors’’ est engagée d’abord,
2 ou 3 ans après,l
’équipe des petits ‘’Cadets’’
Est formée par les jeunes frères des grandets !

Il y a entre autres le frère de Nicolafrancesco,
De Milou Perroud, et moi, frère de Robert Pernoud.

Le dimanche matin les matchs ont lieu
Dans Lyon et la proche banlieue.
On se déplace en bus, en tram ou pédibus !

Nous jouons sur des terrains en plein air,
Souvent inondés par la pluie de la nuit !

La balle en cuir fatigué se déforme et se gorge d’eau.
Devenue lourde, glissante et sournoise,
Ce n’est plus un cadeau :
Une passe un peu sèche, comme il se doit,
Par temps froid, vous retourne un doigt !
Ou la balle humectée, dans vos mains a glissé,
Comme une malicieuse savonnette ;
Vous la chopez en pleine binette…
_
Les panneaux sont en bois et pleins de fantaisie :
Ils ‘’écrasent’’ le rebond sur les parties moisies
Ou sont pleins de frénésie !
* * * 
Il n’y a pas d’arbitre, pas d’arbitre officiel !
Vous devinez la suite … lors d’erreurs substantielles !

Un joueur d’une des deux équipes s’est dévoué ;
Pour le récompenser : il se fait engueuler !

La première année, nous les cadets avons dérouillé !
Méchamment dérouillé … j’ose à peine en parler.
Je crois, non, j’en suis sûr, que c’est à la Croix-Rousse
Que l’on a dégusté, écœurés, mortifiés,
Notre plus belle ‘’rouste’’ !
Par le petit frère Buffière …

Son aîné avait déjà une grande renommée
Qui s’est encore renforcée au fil des années !
* * *
Le samedi soir, parfois, mon frère Robert, sympa,
M’emmenait voir une ’’compète’’ de champions de basket …
C’était ‘’Hall de la Mécanique’’, dans un bâtiment titanique,
De la foire de la ville installée près du Rhône.

J’y ai vu, entre autre, une sélection de l’armée américaine
Se faire ‘’généreusement taper’’ par une sélection lyonnaise !
Des noms de champions régionaux me reviennent à l’esprit :
Busnel, Buffière, Sahy …
(Raymond Sahy, retrouvé dans mon club de retraités 
après plus de cinquante années !)

J’abandonne l’équipe des J.C.L. car je suis devenu pensionnaire
A Authezat, puis à la Martinière.
(interne ou interné ?)

Faute de participants sans doute,
Cette équipe ‘’cadets’’ s’est dissoute …
_
 Adulte, j’ai repris le basket, avec pas mal d’anciennes têtes.
(les frères Jacobelli, Milou Perroud et d’autres nouveaux adeptes…)
Notre terrain s’est amélioré, même l’éclairage a été installé.
Mais sans pécule, moyens ridicules …
Matériel récupéré et mal adapté,
Erigé par des bénévoles qui le rafistolent !

Les poteaux électriques, contre toute logique,
Etaient proches du terrain,
 Espace bien trop restreint !

Ces foutus poteaux en bois étaient bloqués
Sur des montants en ciment eux-mêmes enterrés.
Ces fixations se faisaient par des demi-colliers de tige filetée
Traversant les montants en ciment et ceinturant les poteaux.

Le plus grave …
Ces tiges filetées, grosses comme un doigt de la main,
Etaient trop longues et dépassaient du côté du terrain ! ! ! 

Un dimanche matin, par très beau temps,
Match disputé âprement, par l’équipe fanion ! Public légion !

Attaque, repli, défense, contre-attaque, tir, échec,
Récupération, passes rapides, course effrénée !
Dans la foulée, Jean Morand feinte et tire …

Etroitement marqué, il est projeté sur un poteau !
Sa cuisse le heurte violemment,
La tige filetée y entre profondément,

Artère fémorale crevée  !
Le sang coule par giclées !
Chaque battement du coeur pulse un petit geyser ! ! !

Dans le public, un des fils Marron, (Maurice je crois ?)
Défait sa ceinture et en deux secondes fait un garrot.

Le sang ne fait plus que suinter par la plaie déchiquetée.
Maurice Marron, sans stresser, fait transporter le blessé :
Téléphone, ambulance, hôpital, urgence !
___
Après ça, qui a revu, qui se souvient,
Avoir revu Jean Morand sur un terrain ? ? ?
.....................
Sommes maintenant délicats : nous lorgnons, à deux pas,
Un gymnase en chantier qu’on zieute en affamés :
Rue Armand, attenant à l’école … Il faut voir la mairie ;
Je ne sais qui s’y colle, mais il gagne son pari !

Fini le club des J.C.L. (Jeunes Croix-Luizet ),
Nous devenons P.L.C.L. (Patronage Laïque Croix-Luizet ).

Comme des renégats, des traîtres, des Judas,
Nous avons renié le club qui nous avait formés !
Pour un maillot et un short, pour un peu de confort,
Et un vestiaire chauffé, finis les courants d’air !
Pour jouer sur plancher, terrain déjà tracé,
A l’abri des frimas et des autres aléas.

Maintenant, nuit tombée, après boulot et dîner,
On peut s’entraîner sur un plancher bien éclairé.

Un soir par semaine, un joueur de l’ASVEL,
Semi-professionnel, vient nous diriger et nous conseiller !

Il se serait abstenu, ne serait pas venu,
Sur notre ancien terrain si mal fichu.

Au P.L.C.L., une équipe rénovée s’est constituée.
 Milou Perroud, notre pivot, est encore parmi nous.
Son expérience et son adresse sont appréciées
Et les nouveaux ont beaucoup progressé.
___
Le premier mai, comme dans le passé,
Notre coupe est disputée, par les équipes invitées.
En retour, nous faisons d’autres tournois
Sollicités par des clubs sympa.

En ce temps–là, les matchs se faisaient
En 2 périodes de 20 minutes,
Le panier à 3 points n’existait pas.

Pour les coupes d’une journée, rencontres éliminatoires
Disputées par 8 équipes,

Les 2 périodes ne duraient que 15 minutes …
Coupées par un bref repos.

Mais avec les temps morts, les changements de joueurs,
Le match durait facilement 45 minutes.
Sur généralement un seul terrain,
Il ne fallait pas ‘’amuser le terrain’’ !

Les matchs devaient s’enchaîner sans dérapage,
Sans haut-parleur et sans tableau d’affichage ;

Sur la touche, c’est la table de marque, au sifflet à roulette,
Qui gérait tout, s’égosillant à tue-tête.
* * *

Ce jour-là, printemps 58, fin mai, coupe dans le Beaujolais.
M
a femme et Sylvie, notre fille de 6 mois,
Sont venues avec moi.

Sommes encore dans le bain, après les 4 matchs du matin.
Pic-nic avant la demi-finale et, peut-être … la finale ?

 Effectivement, nous y sommes !
Finale de 2 fois 20 minutes, âpre, qui se dispute
En s’accrochant comme des brutes.

L’enjeu est de taille, nous livrons bataille…
J’ai 4 fautes personnelles, le combat n’est plus fraternel !

Mon capitaine m’a sorti pour m’éviter les 5 fautes
Car la pression est de plus en plus haute !

D’un seul point sommes menés !
Au chrono, il ne reste plus que 9 secondes !

Ça va se terminer. Sommes battus … C’est foutu !
Vers la table de marque, je suis désespéré.

Mon capitaine demande le score et me fait entrer.
Lui et moi savons que le match est plié …
Puisqu’il ne reste plus que 9 secondes à jouer !
_
Je reçois la balle à 2 pas de la ligne médiane …
Que faire de ce je-ne-sais-quoi qui me brûle les doigts ?

Mes partenaires sont marqués, je pivote de tous côtés ;
Impossible de leur passer la balle sans se la faire piquer.

Je ne sais qu’en faire, je vis un enfer !
La table va siffler ! Misère ! Je suis liquéfié …

Au diable vauvert, je vois le panier, à des années lumières.
Ne suis pas expert, mais que faut-il faire ?

Je lance la balle, mes copains râlent !
Courbe en forme de coupole…magnifique parabole !

La balle poursuit sa belle envolée,
Finit par descendre vers le panier,
Ne touche même pas le cercle de ferraille,
Fait
‘’ frout…’’ en passant dans le filet ! ''

Moins d’une seconde après : un grand coup de sifflet  !
Tournoi terminé … La coupe est gagnée ! ***

Mes copains ont enfin compris,
Se jettent sur moi et m’ont saisi …
Et me portent en triomphe ! Mais oui !

Ma femme s’est alarmée, croit qu’on va me lyncher … 
Ç’aurait pu arriver si j’avais raté ce panier.

NON ! C’est faux !
On m’aurait blâmé, sermonné, engueulé ...
Pour finalement oublier et me pardonner.

*** C’est l’unique ‘’exploit’’ de ma ‘’carrière’’ de basketteur.
L’année suivante, nous avons perdu cette coupe.
     
                    
                          

Djipy, fév.2005,

 

 

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